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Décrochage
22 décembre 2004

Recife

C'était un 1er avril, ou du moins, la nuit du premier au deux avril, il y a quelques années. C'était (encore !) dans un avion. Un MD100 d'Alitalia, parti de Rome quelques heures plus tôt, à destination de Buenos-Aires.

J'étais en classe éco, environné de familles italiennes sourdes. Enfin, disons qu'elles avaient une certaine tendance à parler haut, voire même fort. Une mamie à ma gauche récitait (à voix haute bien sûr) chapelet sur chapelet, et le groupe dont deux membres étaient coincés à ma droite tentait de rester en contact avec le reste de la tribu six rangs plus loin.

Bref, le boxon.

Et c'est là que je l'ai vue.

Non, pas une ravissante Italienne. Non, pas la femme de ma vie. Rien de tout ça... (vous allez être déçus)...

Sur l'écran principal de la cabine défilait méthodiquement la géoposition, un système basé sur le GPS qui diffuse en boucle une carte du parcours, avec ville de départ, d'arrivée, le tracé du vol, les heures de vol, les heures restantes avant l'atterrissage, l'altitude, la vitesse sol, la température extérieure, l'heure locale à destination etc... Bref le genre de truc hypnotique qui une fois que je l'ai aperçu me réduit à l'état de légume absorbé dans la contemplation de l'écran, le défilement des minutes, des pieds, miles par heure et degrés fahrenheit. La géoposition, c'est un peu comme France Info. Toutes les sept minutes le même flash qui revient, et qui ne change que quand une dépêche AFP annonce un tremblement de terre ou la mise en examen d'un président de la république. Et bien, je ne sais pas pour vous, mais quand je mets France Info, je n'arrive plus à l'arrêter. Hypnotisé. Légumisé. Abrutisé. Stupidisé.

Et paf ! Me voila parti dans la contemplation de l'écran. Le petit avion schématisé sur l'immense carte, puis son agrandissement avec la région environnante. Nous approchons de la côte Brésilienne que nous allons croiser aux alentours de Recife. L'atlantique a été traversé presque à l'horizontale à partir de Dakar. Et c'est là que je l'ai vue...

C'est là que j'ai vu un mince trait bleu un peu au dessus de Recife. Parfaitement horizontal, que le trait rouge de notre trajectoire allait bientôt chevaucher.

L'équateur.

C'était mon premier passage de ligne comme disent les navigants. Pour la première fois j'allais contempler un ciel aux étoiles différentes, regarder le tourbillon au dessus de la bonde de la baignoire tourner dans l'autre sens, avoir le soleil plein nord à midi et assister à la chute des feuilles alors qu'hier les bourgeons montraient le bout de leur nez.

Et dieu sait quelles autres diableries !

En fait c'était plein de première fois. C'était aussi mon premier vol long courrier, c'était la première fois que mon passeport allait être tamponné et c'était la première fois que je devais supporter treize heures de rang deux cent cinquante irréductibles transalpins tonitruants.

Et toutes ces premières fois, c'était pour rejoindre la femme que j'aimais.

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